Un communiqué laconique du groupe présente les nouvelles nominations faisant suite à l’assemblée générale.
Lars Olofsson nommé
“Le Conseil d’Administration du groupe Carrefour s’est réuni ce jour à l’issue de l’Assemblée Générale Mixte statuant sur les comptes de 2010. Il s’est félicité de l’adoption, à une très large majorité, de l’ensemble des résolutions soumises au vote de l’assemblée et en particulier de celle relative à la scission de la société DIA. Il a par ailleurs procédé aux nominations suivantes :
M. Lars Olofsson est nommé Président-Directeur Général du Groupe Carrefour,
M. Sébastien Bazin est nommé Vice-Président du Conseil d’Administration,
M. Amaury de Seze assurera les fonctions d’administrateur référent,
Mme Anne-Claire Taittinger prend la présidence du Comité des nominations,
Mme Mathilde Lemoine celle du Comité des comptes,
M. Thierry Breton la présidence du Comité des rémunérations.
Enfin le Conseil, unanime, a remercié M. de Seze pour les trois années durant lesquelles il a présidé avec chaleur et autorité le Conseil d’Administration du groupe Carrefour.”
Décryptage des nominations suite à l’assemblée générale de Carrefour
Vous pouvez, en cliquant sur les noms, “visiter” leurs fonctions. C’est en soit instructif du système de gouvernance de l’enseigne. Toutefois, il est important de faire d’autres remarques.
Pour Lars Olofsson, la médaille – qui pour nous est en chocolat, qu’une certaine presse s’empresse de désamorcer comme n’étant pas la preuve d’une promotion – aura immanquablement des retentissements auprès des cadres et salariés. Encore une erreur de communication interne. Alors que le groupe présente en assemblée des chiffres de 411.000 salariés au niveau mondial, en dehors de Dia représentant 45.000 salariés pour leur part, soit un total de 456.000 pour 2011, nous assistons à une réduction générale de 3% des effectifs face à l’an dernier, alors qu’il subissait déjà une baisse de 4% par rapport à l’année précédente.
Certains n’hésitent plus à dire en interne que : “ne progrèssent maintenant que ceux qui se servent et non ceux qui servent”.
Les mêmes font le constat que les nominations sont annoncées en haut lieu mais plus les départs, allez savoir pourquoi ! Il faut même aller voir les communiqués de la concurrence pour savoir ce qui se passe en interne.
Sacré régime Duncan, hyperprotéiné pour s’affiner !
Cette nomination est, pour nous, une mise sous contrôle du dirigeant s’il y avait besoin de le faire savoir…
Pour Amaury de Seze, un nombre croissant de grandes sociétés font le choix de donner des fonctions spécifiques à un administrateur sur le modèle anglo-saxon du «Senior Independent Director». Il a pour mission principale d’apporter au conseil une assistance consistant à s’assurer du bon fonctionnement des organes de gouvernance de la société. Cet administrateur porte parfois le titre de vice-président, il est aussi qualifié «d’administrateur référent».
L’administrateur référent peut se voir confier une mission particulière de vigilance dans le domaine des conflits d’intérêts [est-ce possible entre gens de bonne(s) – et grande(s) – compagnie(s) !] et assurer une fonction de garant de la bonne marche de la procédure de déclaration et d’instruction concernant le cas échéant ceux-ci. En effet, choisi parmi les administrateurs indépendants, il dispose d’une neutralité et d’une indépendance accrues au sein du conseil [sic], dans la mesure où il peut notamment réunir les membres du conseil hors la présence du directeur général et ou du président… [merci Lars]
Son existence et ses pouvoirs n’ont rien de légal ou de statutaire, mais procèdent du conseil qui doit prévoir formellement dans son règlement intérieur ses missions, pouvoirs et prérogatives.
L’Autorité des Marchés Financiers considère que l’intervention d’un administrateur référent est de nature à prévenir les conflits d’intérêts et recommande la création de ce dispositif, surtout quand les postes de président et de directeur général sont fusionnés. Dans son rapport 2009 sur le gouvernement d’entreprise, l’AMF a «invité les sociétés, lorsque des changements de gouvernance avaient lieu, à indiquer les dispositions adoptées par la société pour prévenir les éventuels conflits d’intérêts comme par exemple la désignation d’un administrateur référent». [Source IFA]
C’est donc Amaury de Sèze qui vient chapoter Lars Olofsson aujourd’hui et prend la position d’homme fort “non exécutif”. On s’étonne aussi qu’il puisse y avoir des conflits d’intérêts possible… enfin, comment est-ce possible !
Pour Sébastien Bazin, c’est la mise en avant du fonds et la continuité d’une stratégie que de nombreux analystes décrivent comme non opératoire. Les jeux de pouvoir viennent de se renforcer.
Pour Mathilde Lemoine, celle que tous présentent comme économiste et humaniste, n’en est pas moins technicienne, ayant exercé ses fonctions de conseil auprès des cabinets de François Loos (ministre délégué au Commerce extérieur) entre 2002 et 2005, d’Hervé Gaymard puis de Thierry Breton alors ministres de l’Economie et des Finances. Elle sera également proche de Dominique de Villepin alors Premier ministre.
Mathilde Lemoine est proche du Parti Radical. On se souvient aussi de l’affaire révélée par Le Parisien il n’y a pas si longtemps à propos des fichiers de la banque suisse HSBC mettant en cause 3 000 fortunes françaises. « Est-ce un hasard si la ministre des Finances, Christine Lagarde, se [faisait alors] conseiller une fois par mois par quatre économistes, dont l’épouse de Dominique Paillet ([conseiller spécial de Jean-Louis Borloo et] porte-parole de l’UMP), une certaine Mathilde Lemoine ? Celle-ci est, à ses heures perdues, l’économiste en chef de la HSBC. Un pur hasard, forcément. » [Source : Bakchich 19 mars 2010].
Professeure à Sciences-Po (où elle enseigne la macroéconomie), Mathilde Lemoine fut de la commission Attali en 2010, est l’un des 30 membres du Conseil d’analyse économique placé auprès du Premier ministre et chargé d’éclairer le gouvernement. Elle vient de publier une nouvelle édition des “Grandes Questions d’économie et de finance internationales” (De Boeck, 2012) pour mieux décoder l’actualité. Elle est née en 1969.
Nous assistons donc à la super-surveillance des bancaires présentent dans le groupe sur la foncière… au moment même où la Société Générale se découvre suite à un courrier reçu le 20 juin 2011 à l’AMF, déclarant le franchissement de seuil, le 15 juin 2011, par suite d’une acquisition d’actions sur le marché dans le cadre de ses activités de trading pour compte propre. C’est donc 7,87% du capital et 6,78% des droits de vote de la société qui viennent de prendre un nom.
Un décryptage spécifique sera fait prochainement à ce sujet. En deux mots : Arnault et Colony vont apprendre à marcher encadrés !