Lundi 2 septembre 2019, le tribunal de commerce de Paris a condamné deux entreprises du groupe Amazon (Amazon services Europe et Amazon France services) à modifier sous six mois, et sous astreinte, plusieurs clauses des conditions générales d’utilisation de sa « place de marché » et à payer une amende de 4 millions d’euros. Ces modifications vont permettre de rééquilibrer les relations commerciales entre Amazon et les entreprises, souvent de taille modeste, qui commercialisent des produits sur sa « place de marché ». Cette condamnation fait suite à l’assignation d’Amazon par Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances, en juillet 2017, à l’issue d’une enquête menée par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).
Dans son jugement du 2 septembre, le tribunal a considéré qu’une dizaine de clauses des conditions générales d’utilisation imposées par Amazon à ses partenaires commerciaux étaient particulièrement déséquilibrées et ne respectaient donc pas les règles fixées par le code de commerce. Ces clauses permettant par exemple à Amazon de modifier unilatéralement ses conditions commerciales ou de clore sans explication ni préavis le compte d’un de ses vendeurs. Le tribunal a ainsi décidé de d’imposer à Amazon de modifier ses conditions générales d’utilisation dans un délai de six mois. Si la mise en conformité n’est pas réalisée dans le délai imparti, Amazon devra payer une amende de 10 000 euros par jour de retard. C’est la première fois qu’une telle astreinte – particulièrement importante pour garantir l’effectivité de la sanction – est décidée par le tribunal de commerce à la demande du ministre. Par ailleurs, le tribunal a sanctionné Amazon d’une amende de 4 millions d’euros, ce qui correspond à ce jour à la plus forte amende prononcée dans ce type de procédures.
Ce jugement fait suite à une enquête menée par la DGCCRF entre 2016 et 2017 et ayant concerné les pratiques commerciales de toutes les grandes « places de marché » numériques alors présentes sur le marché français. Sur la base des constats relevés par les agents de la DGCCRF, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, et garant de l’ordre public économique, avait assigné Amazon devant le tribunal de commerce de Paris.
Les « places de marchés » (ou « market places ») sont des plateformes numériques qui mettent en relation des consommateurs avec des entreprises tierces et se rémunèrent notamment par le paiement d’une commission sur les transactions. Ces entreprises tierces sont généralement de petites entreprises qui ont besoin de la notoriété d’une plateforme pour atteindre les consommateurs. Il existe ainsi un déséquilibre structurel entre les différentes parties et donc un rapport de force déséquilibré. Pour garantir le bon fonctionnement des marchés, ce déséquilibre ne doit pas se traduire par des clauses ou pratiques abusives.
La DGCCRF est chargée de veiller à l’absence de déséquilibre significatif dans les relations commerciales pour garantir le bon fonctionnement des marchés et protéger les entreprises françaises. En tant que garant de l’ordre public économique, le ministre de l’Économie peut assigner des entreprises devant le tribunal de commerce afin de faire sanctionner par le juge les pratiques ou clauses contractuelles portant atteinte à la loyauté des relations commerciales et imposer leur suppression ou leur arrêt. Pour ce type de pratiques, le ministre a par exemple déjà fait condamner deux agences de voyage en ligne pour déséquilibre significatif dans leurs relations avec les hôteliers.
Bruno Le Maire a déclaré : « Le rôle de l’État est de garantir l’ordre économique et de protéger les intérêts des consommateurs. Avec Agnès Pannier-Runacher, nous restons pleinement mobilisés pour assurer une équité entre les différents acteurs. Les géants du numérique doivent respecter les règles de concurrence et payer le juste impôt. C’est tout le sens des travaux que l’on mène à l’OCDE pour trouver une solution, dans les meilleurs délais, en matière de régulation des géants du numérique. »
Cédric O, secrétaire d’État chargé du numérique, a également déclaré : « La loi doit s’appliquer en ligne comme hors ligne. Le Gouvernement est résolument engagé dans la promotion et la défense d’une économie numérique équilibrée et transparente au service des consommateurs français ».