“Qu’est-ce qu’un bon produit ? Jadis, c’était simple. On savait d’où il venait. L’oeuf frais pondu, la salade qu’on allait cueillir au jardin. Quant au prix, le paysan, producteur avant d’être consommateur, ne comptait pas sa peine.
Mais la peine des autres, il faut bien la compter. Le mal qu’ils se donnent pour produire la marchandise, pour l’emballer, pour la distributer, pour faire l’article. Toute peine mérite salaire. Alors les salaires s’additionnent, les frais s’accumulent, se chevauchent, finissent par faire double et triple emploi. Chacun tire à soi la couverture. Et les prix montent. On perd complètement de vue les deux bouts de la chaîne : le produit et le client.
En ouvrant son premier magasin, en 1960, Carrefour s’était juré de rompre cet enchaînement, de ramener les pratiques commerciales à l’impitoyable simplicité dont Bernardo Trujillo s’est fait apôtre. A l’époque, Carrefour s’était attaqué aux prix. Mais aujourd’hui ce n’est plus suffisant. Dernière l’étiquette, il y a le produit. Et c’est avec lui que le client rêve de retrouver un contact direct, immédiat.
C’est pourquoi Carrefour fait aujourd’hui un pas de plus dans la voie qu’il s’était fixée. Il redécouvre le produit. Il l’offre à nouveau au client. Dans sa simplicité, dépouillé des artifices de la mode, des faux-semblants de la publicité.” Cet extrait de L’express, Spécial Carrefour, publié en 1976 nous laisse une piste indéniable de la stratégie originelle de l’enseigne Carrefour, qui, contre toute attente, trouve plus difficilement ses appuis dans la stratégie des produits Carrefour Discount aujourd’hui. Le prix est présent, moins le produit en lui-même, pour lui-même, comme nous l’évoquions dans notre article “Comment brouiller la communication Carrefour“.